Une macabre découverte
L’année suivante, un jour de l’été 1944, le médecin luchonnais Blaise Baylac et des camarades randonnent dans le secteur d’Espingo. Ils découvrent par hasard le cadavre de l’abbé Stella, en traversant au-dessus de la Coume de l’Abesque, à la base des Spijeoles.
Au premier abord, ils ont l’impression que c’est quelqu’un de vivant, tranquillement assis au milieu des gros blocs, qui les observe d’en haut. Mais la personne est décédée. Seules la tête et les épaules dépassent de la neige. Le reste du corps est parfaitement conservé. En le dégageant, on constate que le malheureux tient son bréviaire ouvert entre les mains. Des papiers permettent d’identifier Francesco Stella.
D’après Jean Cazalbou, renseigné par le Dr Baylac, le prêtre avait un équipement correct (bonnes chaussures, bâton, sac à dos avec des vivres). Chose assez rare chez les évadés de France.
Paul Lassalle suppose que « l’abbé a dû s’arrêter, épuisé. Il s’est installé, pensant peut-être pouvoir se ressaisir, ouvrant son bréviaire – à l’époque les curés en avaient toujours un à la main. Il est sans doute mort de froid ».
L’évacuation du corps et l’inhumation
Averti par le Dr Baylac, Guillaume Oustalet, le maire du village d’Oô, organise une expédition pour récupérer la dépouille de l’abbé Stella.
Trois jeunes gens sont réquisitionnés comme porteurs : Jean Péfaure, Léon Fournier et Paul Lassalle, qui a tout juste 17 ans. Le maire les accompagne.
Sur place, le corps est mis dans une couverture puis attaché à une perche en bois (en 1944, ce n’est pas encore la perche Barnaud). Deux jeunes portent, et le troisième prend le relais. On s’engage à un moment dans une pente très raide, avant de rejoindre le bon sentier. A Espingo, le mort est chargé sur l’ânesse du refuge, et descendu ainsi jusqu’à Oô.
Paul Lassalle me raconte que le maire lui a offert le stylo de l’abbé Stella, mais qu’il n’en a pas voulu.
Lors d’une grande cérémonie, le prêtre est enterré dans le cimetière d’Oô. Sa tombe se voit toujours aujourd’hui.
L’acte de décès – dressé sur la déclaration de Jean Péfaure – mentionne le 10 septembre 1944 comme date officielle de la mort de Francesco Stella (théoriquement, de la découverte de son corps, puisqu’il avait disparu), mais la plaque sur sa tombe indique bien l’année exacte : 1943.