« L’idée de guerre n’est donc point dissolvante et funeste ainsi qu’on s’est plu trop longtemps, par erreur ou malice, à le blasphémer à nos enfants. Elle est au contraire moralisante et génératrice des meilleurs sentiments qui redressent l’homme… la guerre fait partie de la mort. Nous serions des sots et des ingrats si nous étions capables de ne pas évaluer tout ce que nous devons de reconnaissance à la mort ! » (Henri Lavedan, Bon an mal an, 16 septembre 1911)

« On comprend très bien pourquoi, dans le plan de la souveraine Providence, la guerre n’a pas eu la brièveté foudroyante que nous avions escomptée. Cette guerre doit être pour la fille aînée de l’Eglise une délivrance, une résurrection. La résurrection implique d’abord le tombeau. » (Général Cherfils, Le Gaulois, 26 décembre 1914)

Comme preuve s’il en faut une que la stupidité belliqueuse et mortifère dépasse les clivages politiques, voici un écrit de l’anarchiste Proudhon (qui était aussi un très violent antisémite) :

« Salut à la guerre ! C’est par elle que l’homme, à peine sorti de la boue qui lui servit de matrice, se pose dans sa majesté et dans sa vaillance ; c’est sur le corps d’un ennemi abattu qu’il fait son premier rêve de gloire et d’immortalité. Ce sang versé à flots, ces carnages fratricides font horreur à notre philanthropie. J’ai peur que cette mollesse n’annonce le refroidissement de notre vertu. Soutenir une grande cause dans un combat héroïque, où l’honorabilité des combattants et la présomption du droit sont égales, et, au risque de donner ou recevoir la mort, qu’y a-t-il là de si terrible ? Qu’y a-t-il surtout d’immoral ? La mort est le couronnement de la vie ; comment l’homme, créature intelligente, morale et libre, pourrait-il plus noblement finir ?

Les loups, les lions, pas plus que les moutons et les castors, ne se font entre eux la guerre ; il y a longtemps qu’on a fait de cette remarque une satire contre notre espèce. Comment ne voit-on pas, au contraire, que là est le signe de notre grandeur ; que si, par impossible, la nature avait fait de l’homme un animal exclusivement industriel et social, et point un guerrier, il serait tombé, dès le premier jour, au niveau des bêtes dont l’association forme toute la destinée ; il aurait perdu, avec l’orgueil de son héroïsme, sa faculté révolutionnaire, la plus merveilleuse de toutes et la plus féconde ? Vivant en communauté pure, notre civilisation serait une étable. Saurait-on ce que vaut l’homme sans la guerre ? Saurait-on ce que valent les peuples et les races ? Serions-nous en progrès ? Aurions-nous seulement cette idée de valeur, transportée de la langue du guerrier dans celle du commerçant ? Il n’est pas de peuple ayant acquis dans le monde quelque renom, qui ne se glorifie avant tout de ses annales militaires : ce sont ses plus beaux titres à l’estime de la postérité. Allez-vous en faire des notes d’infamie ? Philanthropes, vous parlez d’abolir la guerre ; prenez garde de dégrader le genre humain… » (P.-J. Proudhon, La Guerre et la Paix, 1861)

Image de guerre, près d’Arras (1914-1918).