Le monument aux morts de Campan témoigne, avec beaucoup de force pathétique, de la catastrophe du premier conflit mondial, des malheurs de la guerre.

Sculptée par Edmond Chrétien, « la Pleureuse » est une oeuvre assez connue en Bigorre.

S’agit-il d’une veuve, d’une soeur, d’une mère ?

Seules les mains aux doigts entrecroisés sont bien visibles, le reste du corps étant recouvert par la lourde et sinistre cape de deuil.

On croirait que la statue n’a pas de visage.

Il faut vraiment s’approcher pour découvrir les traits rudes et graves de la Pleureuse.

A vrai dire, cette surprenante figure, peu féminine, rappelle plutôt un masque mortuaire.

En tout cas, la personne – vieillie par la douleur avant l’âge ? – n’est pas jeune.

Les yeux sont clos. Le dessin de la bouche exprime une très profonde tristesse, peut-être même une colère rentrée.

En France, il existe d’autres monuments aux morts de la Grande Guerre qui célèbrent la peine et le recueillement des mères ou des veuves, des familles, sans laisser la moindre place à l’habituelle rhétorique martiale, à la glorification du héros. Au contraire, la guerre est dénoncée, avec son long cortège de malheurs. Un site web indispensable fait connaître ces monuments pacifistes.

Je trouve certains points communs entre la Pleureuse de Campan et les sculptures de Henri Coutheillas à Guéret (23), à Bellac (87) ou encore à Châlus (87). Surtout, je pense à une oeuvre fort émouvante de René Quillivic à Fouesnant (29) : la statue de Marie-Jeanne Nézet – trois de ses fils sont morts à la guerre.

Ainsi que nous l’avons déjà vu sur le blog, ailleurs dans les Pyrénées, à Gouaux-de-Larboust et à Cazeaux-de-Larboust, les plaques des soldats représentent aussi la mère ou l’épouse.

Devant la dignité de pareils monuments, combien paraissent dérisoires les propos enthousiastes des chantres de la mort à la guerre :

« Ah ! Que la mort du  brave est belle ! Qu’elle est belle, La mort du combattant qui meurt sans avoir fui ! Vainqueur, la gloire vient l’emporter sur son aile, Et, si, c’est la défaite absurde ou criminelle, La honte des vaincus ne s’abat pas sur lui ! » (Paul Déroulède, Poésies militaires, 1896)

« Oui, bienheureux qui sert la France, Bienheureux ceux qui vont courir Au danger comme à la souffrance : C’est une fière préférence Que d’être choisi pour mourir ! » (Paul Déroulède, Poésies militaires, 1896)

« Heureux ceux qui sont morts dans une juste guerre. Heureux les épis mûrs et les blés moissonnés. » (Charles Péguy, Eve, 1913)

« La guerre au front, c’est l’action utile, c’est la vie, au pis-aller c’est l’immortalité. » (Gaston de Pawlowski, La Baïonnette, 4 mai 1916)

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Le monument aux morts de Campan. (Photo : Michel Bessone)
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Ceux de Sainte-Marie. (Photo : Michel Bessone)
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Ceux du Bourg. (Photo : Michel Bessone)
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Ceux de La Séoube. (Photo : Michel Bessone)
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Symboles de richesse valléenne en temps paix : le bois… (Photo : Michel Bessone)
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… la laine… (Photo : Michel Bessone)
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… le beurre. (Photo : Michel Bessone)
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La Pleureuse. (Photo : Michel Bessone)
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Ses mains. (Photo : Michel Bessone)
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Son visage. (Photo : Michel Bessone)
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La Pleureuse vue de dos. (Photo : Michel Bessone)
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Une énigmatique Mater Dolorosa. (Photo : Michel Bessone)