Au seuil du cimetière de Guchan, on remarque à droite, fixée au mur, une plaque brisée rectangulaire.

Il s’agit d’un monument funéraire gallo-romain qui pourrait dater de la fin du IIe ou du début du IIIe siècle.

Le matériau est du marbre. Autour d’un cartouche central avec une épitaphe presque illisible, le décor présente divers éléments à valeur symbolique.

L’inscription de la stèle

Le texte gravé semble être une dédicace aux dieux Mânes – D(is) M(anibus) – de Untel / ou et à Untel / ou à Untel, faite par un certain Ingenus.

Si les lettres D et M se discernent encore aujourd’hui, nous ne pouvons absolument pas déchiffrer le nom du défunt.

Le décor de la stèle

Comme nous l’avons déjà observé (épitaphe de Silvana) à Anéran, dans la vallée du Louron, des pilastres sont représentés de part et d’autre, mais ici la facture est plus grossière. Les chapiteaux intègrent un motif de palmettes.

Issus d’un vase (urceus) à anses à angle droit, des pampres s’élèvent en serpentant. Ils portent des grappes de raisin.

Deux oiseaux, des colombes, picorent les grappes inférieures. Dos à dos, la cruche au milieu.

Feuilles stylisées et rosettes s’intercalent dans l’ensemble fort géométrique.

Les rameaux de vigne évoquent un alambic. Elles aboutissent à des spirales sans fin.

Comment interpréter cette sculpture funéraire ?

On se tromperait bien sûr en se référant à l’iconographie chrétienne. Rappelons que la pierre, consacrée aux dieux Mânes, est païenne.

Le motif principal, celui des colombes becquetant des raisins, vient de Rome. Et même, pour la colombe, de la Grèce antique, où cet oiseau était souvent représenté sur les stèles mortuaires, y figurant l’âme du défunt (sans rapport avec la colombe attribut d’Aphrodite).

A Guchan, les deux colombes interviennent vraisemblablement comme animaux psychopompes, guides de l’âme du mort dans l’au-delà.

La vigne est symbole dyonisiaque des cycles de la vie qui renaît. Les colombes se nourrissent de son fruit.

Palmettes et surtout spirales ont un sens d’éternité, d’immortalité.

Autres monuments comparables

1) L’archéologue Stéphane Lévêque a signalé il y a une vingtaine d’années la présence à Aulon, en vallée d’Aure aussi, d’une stèle semblable à celle de Guchan, mais christianisée, avec un Christ en croix.

Je ne sais où elle se trouve, à quoi elle ressemble, si l’information est exacte. En tout cas, il ne s’agit pas du remploi gallo-romain du clocher de l’église.

2) A Saléchan, en Barousse, une auge cinéraire.

3) Plaque d’Avezac-Charlas (31), près de Boulogne-sur-Gesse.

4) Stèle provenant de Saint-Lizier, en Ariège. Le dessin des grappes suggère des pommes de pin, chargées également de beaucoup de symboles.

Des colombes romanes à Estensan

Un millénaire après la décoration de la stèle de Guchan, deux colombes ont été représentées sur le tympan à chrisme de l’église d’Estensan.

Elles font peut-être penser davantage à d’autres oiseaux, mais il s’agirait bien de colombes, associées à l’Esprit saint et à l’Eucharistie.

La jeune femme et la colombe (Bourisp)

Oeuvre de Simon Jacquemond, datant de 1956.

Henri Caillavet, grande figure de la vie politique française, longtemps maire de Bourisp, est à l’origine de l’installation de cette statue au centre du village.

Le message pacifique fait peu de doute.

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Stèle gallo-romaine de Guchan. (Photo : Michel Bessone)
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Stèle gallo-romaine d’Avezac-Charlas, relevée par Julien Sacaze. (Photo : Michel Bessone)
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Stèle gallo-romaine de Saint-Lizier, relevée par Julien Sacaze. (Photo : Michel Bessone)
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Tympan roman de l’église d’Estensan. (Photo : Michel Bessone)
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Détail du tympan de l’église d’Estensan. (Photo : Michel Bessone)
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La jeune femme et la colombe, statue à Bourisp. (Photo : Michel Bessone)
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Détail de la statue de Bourisp. (Photo : Michel Bessone)